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23 mai 2008 5 23 /05 /mai /2008 16:54
POP ! Peak Oil Panic dans la presse économique !

Les Echos de vendredi dernier nous gratifie d'une manchette en une (L'envolée des prix du pétrole rattrape Air France-KLM) introduisant un article au ton inquiétant :
La flambée actuelle des cours de l'or noir témoigne d'une prise de conscience brutale : l'approvisionnement en brut risque d'être beaucoup plus problématique que prévu et le "pic pétrolier" apparaît comme une menace bien réelle.
En pages intérieures, avec un autre titre-choc (la crainte d'une pénurie durable et généralisée commence à hanter les marchés pétroliers), le quotidien économique évoque à nouveau l'impensable :
la théorie si contestée du "pic pétrolier" - le fameux "peak oil"
et se fait le relais de la dernière trouvaille du Wall Street Journal  :
l'AIE se préparait à abaisser sensiblement ses prévisions de production mondiale. Engagée dans une vaste étude sur les 400 plus grands gisements pétroliers de la planète [...], l'Agence en aurait déjà tiré une conclusion alarmiste : l'approvisionnement en brut sera, à l'avenir, beaucoup plus problématique qu'on ne le pensait.
Un tel scoop est inhabituel : l'AIE, émanation de l'OCDE, est une maison sérieuse qui n'a pas l'habitude de laisser traîner ses brouillons partout. On peut donc en déduire que cette fuite est parfaitement organisée.

On peut alors s'étonner qu'au moment où le baril s'enflamme à des vitesses qui nous surprennent, l'AIE n'hésite pas à jeter encore plus de combustible dans le foyer de la spéculation alors que son rôle, jusqu'à présent, était plutôt de jouer le rôle d'extincteur, en étouffant toute velléité d'inflation des prix sous la masse de lourds WEOs (World Energy Outlook = Panorama Energétique Mondial ; prononcer oui-ho) bourrés de chiffres à l'optimisme inébranlable.

Il y a près de trois ans, nous ne pensions pas, lors de la production de la vidéo Oilway to Hell, que le panneau ci-contre aurait un jour une réalité. Au contraire, l'objectif était de souligner la position à ce moment négatrice de l'Agence quant au plafonnement prochain de la production pétrolière.

La publication en novembre dudit rapport tomberait-elle un peu trop tard ? Trop longtemps après la cérémonie de clôture des Jeux Olympiques de Pékin peut-être ? Voilà qui donne encore un peu plus de nourriture à notre thèse d'une guerre économique en cours entre la Chine et l'OCDE, notamment sur le plan des matières premières via la manipulation des marchés mondiaux.

L'Agence avait déjà commencé à envoyer quelques boulets vers la Chine lors de la publication de son WEO 2007, où elle énumérait les quantités monstrueuses de CO2 que la Chine allait émettre dans le futur - mais sans vraiment s'apesantir sur les quantités déjà émises. Il valait mieux, car selon un récent document de James Hansen, un très renommé climatologue, les Etats-Unis ont émis à eux seuls plus du quart du dioxyde de carbone liée à l'activité humaine... tandis que la Chine en a produit moins du dixième. Cette injonction à la mode du "fais ce que je dis, pas ce que je fais" avait probablement pour objectif de forcer la Chine à donner un coup de frein à son développement.

Nous attendons en tout cas avec impatience ce fameux WEO 2008 pour en analyser la qualité de l'argumentation. La méthodologie employée - consolider les prévisions de production des principaux gisements mondiaux - n'a rien de contestable en soi, mais on est très curieux de savoir où l'AIE est allé chercher les données d'entrée et comment elle les a vérifiées : il n'y a que des économistes à l'Agence, pas de géologues.

Une approche "conservative", qui consiste à ne retenir que les valeurs les plus basses en cas de désaccord entre plusieurs sources, ne peut que déboucher sur la conclusion d'un pic pétrolier imminent, puisque c'est exactement ainsi que procèdent... les peakniks.

L'autre explication, plus simple, est que la bulle pétrolière est à son maximum, et que même ceux qui tentaient de garder la tête froide finissent par s'échauffer à leur tour. Et puis, ça fait vendre des WEO 2008 et des exemplaires du WSJ et des Echos...
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Article également publié sur AgoraVox et Yahoo!
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