Prix du pétrole en euros (et en diverses monnaies) - décembre 2014

Quelle chute, mes aïeux !

Cela faisait longtemps qu'on avait pas vu de telles variations d'un mois sur l'autre.

Après, il faut relativiser: nous sommes simplement revenus au niveau de 2010, qui n'était pas si bon marché que cela. Mais à la pompe, la baisse a été cette fois-ci répercutée immédiatement par les compagnies de distribution pétrolière, sans doute sous la pression des pouvoirs publics :

Pour nos amis russes, par contre, la barre des 4000 roubles le baril reste franchie haut la main, donnant l'impression d'une progression linéaire et inexorable des cours du brut.

Comments

[Env2100]

Talk is cheap : put your money where your mouth is. Ces deux idiomes anglo-saxons nous rappellent que leur culture sait faire usage de pragmatisme, ce qui dans le cas présent signifie réactivité.
Schlumberger est la première société de services dans le domaine pétrolier ; dans le fonctionnement spécifique de l'eéconomie, c'est elle qui absorbe les pentes et les pics d'activité, et elle
est un indicateur de l'activité équivalent à ce que sont en France les sociétés de travail temporaire : early warning, encore un idiome adapté.


 


Alors si nous nous demandions si la baisse du baril était durable, Schlum vient de répondre avec la fulgurance d'un vieux briscard des tatamis en annonçant le licenciement de 9000
personnes, soit 7 % de son personnel. Alors, cette entrecôte ?

[Aerobar Films]

Ces entreprises licencient vite, mais savent recruter tout aussi rapidement.


Dans leur savoir-faire, il y a cette capacité à ajuster instantanément la capacité à la charge, et leurs clients savent en profiter. La baisse des prix du pétrole a entraîné la suspension de
certains projets d'investissement, plus (assez) rentables ; le parapétrolier remercie immédiatement les ressources qui travaillaient sur le projet, puisque le client pétrolier ne paie plus, mais
reviendra dès que le prix du baril sera revenu au bon niveau. Cela peut être dans 3 mois ou dans 2 ans.


Ces licenciements ont lieu dans les pays anglo-saxons, où il est normal et naturel de licencier des gens pour creux d'activité, puis de les rembaucher peu de temps après, quand l'activité est
revenue au beau fixe. De notre citadelle France, cela paraît la loi de la jungle mais là-bas, tout le monde s'en satisfait.

[Env2100]

La situation est grave, aux grands maux les grands remèdes.


 


On le sait depuis un demi-siècle, le pétrole est accroché à l'or. Celui-ci est en chute graduelle depuis janvier 2012. Le pétrole chute-t-il depuis cette date ? Non.


 


On le sait depuis 2003, le pétrole est une vulgaire commodité sans plus d'impact géopolitique que la poitrine de porc. Les commodités chutent depuis juillet 2014. Le pétrole chute-t-il depuis juillet 2014 ? Oui. Ah.


 


Depuis 2003 (officiellement depuis la signature du CFMA fin 2000, mais il faut bien mettre tous ces ordinateurs en place), le prix du pétrole a échappé aux acteurs physiques au profit des
boursiers de tous types - en nombre de transactions par an, le boursier le plus probable est un ordinateur. Jusqu'en 2007, une bulle autogonflante a débordé des valeurs (boursières)
traditionnelles pour se déverser sur toutes les autres valeurs disponibles, dont les matières premières, dont le pétrole. En 2007 la bulle éclate par le trou des subprimes, on connaît la suite,
et le baril s'effondre.


 


Qu'a-t-on fait pour éviter que ce phénomène recommence ? Rien, donc forcément la bulle a repris une bonne taille, sans pour autant que l'économie reprenne où que ce soit. Mi-2014, cette bulle a
commencé à se dégonfler à nouveau sans contrôle, entraînant l'effritement des matières premières, dont le pétrole. Le comportement de tel ou tel producteur me paraît aujourd'hui d'un impact
minimal devant ce reflux de taille mondiale. 


La chute de la bourse hier ne fait que conforter ce phénomène : si le baril ne valait pas cher hier, il vaudra encore moins cher demain s'il n'y a plus d'Euro.


Selon le cas, le pétrole est taggé par les boursiers conjoncturel ou spéculatif, en tous cas sûrement pas refuge. Un boursier ne voit pas de problème à ce que, pris à 20 USD en 2003,
élevé à 149 USD en 2007, il retombe à 20 USD demain. Devant l'inconnue considérable que constitue l'année 2015, il est envisageable que les boursiers fassent retraite sur tout en même temps,
moyen pratique de résorber la bulle, mais violent.


 


Le pétrole saoudien, et dans une certaine mesure russe, se porte bien jusqu'à 25 USD le baril. 80% des plus gros producteurs s'accommodent de 40 USD. Mais nous venons de passer en-dessous de 50
USD, et les trucs de schiste commencent à tordre le nez, ainsi que les sables de l'Alberta. J'avais annoncé des désinvestissements si le baril passait en dessous de 60 USD, et c'est le cas : le
nombre de plateformes en activité sur le sol américain est en baisse depuis un mois. Il n'est pas exclu que nous assistions à de brèves périodes de pénuries localisées alors que le baril continue
de chuter, le sujet est intéressant sur un plan économique.


 


Ca va descendre jusqu'où ? Euh... Tout dépend du comportement des décideurs . Leur spécialité actuelle étant de ne rien faire, il est envisageable que tous les chiffres, y compris la
consommation, continuent de s'effriter.


 


Voyons les choses positivement : nombre de guéguerres au Moyen-Orient ou ailleurs sont aujourd'hui payées par l'excès de pétrodollars. Une chute de cette ressource ne peut qu'améliorer les
choses.